L'ai-je perdu vraiment perdu ?
L'instant où j'ai voulu en parler par surprise,
Est à ce moment même où de ma vue il se dérobe,
Comment vais-je faire sans lui pour que j'englobe,
Tant de souvenirs d'une telle entreprise?
Ce n'est qu'un vulgaire carnet de poèmes,
Dont les feuilles colorées servent de couverture,
A spirales pour faciliter l'ouverture,
J'y cuisine mes mots à la sauce bohème.
Où ai-je pu poser ce carnet de cent feuilles ?
Je ne vis plus, c'est le pire des divorces,
Dans mes mots mal écrits, j'y puise la force,
La trame, où ma poésie naît et se recueille.
Ces fruits mûrs j'aime les confire par délice,
Sur des pages vierges, à l'encre fraîche,
Pour que ma mémoire, bien plus tard ne sèche,
Et par surprise, sur mes doigts gourds ils glissent.
Aujourd'hui mon encre rit jaune d'amertume,
Plume grise d'un pigeon, adieu colombe,
Dans l'inertie de la page blanche, je tombe,
Nu sans ce manteau, je tousse, je m'enrhume.
Pauvre poète d'une si belle randonnée !
Comment pourrais-je transcrire sans mots asservis ?
Cette folle aventure d'une passion en sursis,
Tel l'hamadryade, suis-je mort avec mon carnet?
Quel art d'une science aussi imparfaite,
M'oblige à m'inquiéter de sa disparition
En créant en moi ce grand dilemme poison,
"Ne pourvoir écrire sur des pages muettes".
TIMILO
.lejardinpoétiquedetimilo.com
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